Imagine un instant. Tu es là, au seuil de Preah Khan, et la première chose qui te frappe, c'est ce silence particulier, celui des pierres millénaires qui ont tout vu. Tu entends peut-être le chant lointain des cigales, un murmure doux qui contraste avec la grandeur des lieux. L'air est lourd, chaud et humide, mais il y a cette odeur unique, un mélange de terre mouillée, de mousse séchée et d'une poussière d'encens qui semble flotter encore. Tu poses la main sur un mur de latérite, frais sous les doigts malgré la chaleur ambiante, et tu sens l'histoire dans sa texture rugueuse, ses aspérités. Chaque pas que tu fais sur le chemin d'entrée est comme un écho dans le temps, et tu peux presque sentir le passage des moines et des rois sur ces mêmes dalles, il y a des siècles.
En t'enfonçant un peu plus, la lumière joue avec les ombres, filtrant à travers la canopée dense et les ouvertures des temples. Tu sens le sol changer sous tes pieds. Au début, c'est une allée relativement large, parfois en terre battue, parfois avec de grandes dalles de pierre. Mais très vite, tu commences à percevoir les racines des arbres géants qui s'entrelacent avec la pierre, créant des bosses et des creux inattendus. Le terrain n'est jamais vraiment plat. Il y a ces petites montées, ces descentes douces qui te guident, presque imperceptiblement, vers le cœur du complexe. Tu te sens enveloppé par la fraîcheur relative de l'intérieur des galeries, un soulagement bienvenu après la chaleur extérieure.
C'est là que les choses se corsent vraiment pour la mobilité. Les pavés lisses que l'on trouve parfois ailleurs ? Oublie-les ici. La plupart des chemins sont faits de blocs de grès anciens, souvent fissurés, cassés, ou soulevés par les racines des fromagers. Il y a des trous, des sections où les pierres ont disparu, laissant une surface de terre inégale. Les pentes, même si elles ne sont pas raides comme des montagnes, sont constantes et souvent abruptes pour de courtes distances, en particulier pour accéder aux différentes cours intérieures. Les seuils des portes sont de véritables obstacles, des marches souvent hautes de 20 à 30 centimètres, sans aucune rampe. La largeur des passages varie énormément : si certaines cours sont vastes, les couloirs intérieurs et les embrasures de portes sont très étroits, parfois à peine plus larges qu'une personne. Naviguer avec un fauteuil roulant serait une épreuve quasi impossible, et même avec des béquilles ou une canne, chaque pas demande une attention et un effort considérables.
Quant à la foule, Preah Khan est généralement moins bondé que le temple d'Angkor Wat ou le Bayon, ce qui est un avantage certain. Tu n'auras pas la sensation d'être écrasé, et il y a souvent des moments de calme où tu peux profiter pleinement de l'ambiance. Cependant, cela ne signifie pas que le chemin est toujours libre. Les visiteurs se déplacent, s'arrêtent pour prendre des photos, et dans les passages étroits, cela peut créer des embouteillages. La bonne nouvelle, c'est que les gens sont généralement très compréhensifs et serviables. Si tu as des difficultés, tu verras souvent des sourires, des mains tendues pour t'aider à franchir un seuil difficile, ou des groupes qui s'écartent pour te laisser passer. Le personnel du site est également attentif et habitué à voir des visiteurs de tous âges et de toutes conditions, et leur aide est souvent discrète mais efficace.
Pour être honnête, Preah Khan n'est absolument pas "wheelchair-friendly". La topographie, les obstacles naturels et artificiels rendent l'accès en fauteuil roulant pratiquement impossible au-delà de l'entrée principale. Pour les personnes ayant des problèmes de mobilité significatifs (difficultés à marcher sur de longues distances, équilibre précaire, besoin d'aide pour monter des marches), la visite sera très difficile et frustrante. Il est possible de se limiter aux zones extérieures et à l'entrée, mais le cœur du temple, ses galeries et ses sanctuaires sont inaccessibles sans une grande agilité et la capacité de franchir de nombreux obstacles. Si tu es déterminé à le voir, prévois une aide constante, beaucoup de patience, et accepte que tu ne pourras peut-être pas tout explorer. C'est un lieu magnifique, mais exigeant.
Olya des ruelles