Imagine que tu arrives à Bonaventure. La première chose qui te frappe, c'est l'air. Il est plus lourd, plus doux, chargé d'une odeur de terre humide et de quelque chose d'ancien, presque de l'encens végétal. Le bruit de la ville s'estompe derrière toi, remplacé par un silence profond, parfois seulement brisé par le chant lointain d'un oiseau ou le froissement des feuilles. Tu sens une fraîcheur agréable, même si le soleil est là, filtré par une canopée dense qui t'enveloppe.
Alors que tu t'avances, tu perçois la présence imposante des chênes centenaires. Leurs troncs sont massifs, rugueux sous la paume si tu t'en approches, et leurs branches s'étirent comme des bras géants. Tu entends un léger bruissement au-dessus de ta tête : c'est la mousse espagnole qui pend en rideaux épais, un voile doux et aérien qui murmure au moindre souffle de vent, te donnant l'impression d'être dans une cathédrale naturelle, silencieuse et majestueuse.
Tes pieds foulent des chemins tantôt lisses, tantôt parsemés de gravier qui crisse doucement. Autour de toi, tu sens la présence des monuments, des stèles. Certains sont lisses et froids au toucher, d'autres sont ornés de sculptures complexes, des anges aux ailes déployées dont tu peux sentir les contours délicats, des visages gravés par le temps. Chaque forme, chaque texture te raconte une histoire sans mots, une vie passée, un amour, une perte. L'espace est vaste, mais chaque pas te rapproche d'un fragment de mémoire, d'une âme.
Parmi les innombrables sépultures, certaines te frappent par leur grandeur. Tu perçois des statues de femmes voilées, des obélisques imposants qui s'élèvent vers le ciel, ou des caveaux aux portes lourdes. Tu peux sentir la pierre chauffée par le soleil ou, au contraire, la fraîcheur des zones d'ombre profondes. C'est un musée à ciel ouvert où l'art funéraire prend des formes inattendues, de la simplicité la plus humble à l'extravagance la plus poignante.
Pour y aller, le plus simple est un taxi ou un VTC depuis le centre de Savannah, ça prend une quinzaine de minutes. Si tu conduis, il y a un parking gratuit sur place. L'idéal est de venir tôt le matin ou en fin d'après-midi, surtout au printemps ou à l'automne : la lumière est sublime et il fait moins chaud. Prévois de bonnes chaussures, tu vas marcher pas mal, et surtout, de l'eau. Une carte du cimetière peut être utile, elles sont souvent disponibles à l'entrée ou tu peux en trouver une en ligne pour t'orienter.
En t'éloignant des allées principales, tu peux te diriger vers l'est, et là, tu sens l'air changer de nouveau. Une brise plus forte et plus fraîche te caresse le visage, et tu entends un son plus large, plus ouvert : c'est le fleuve Wilmington. L'espace s'ouvre devant toi, tu sens l'étendue, l'horizon. Le son de l'eau qui clapote doucement contre la berge t'apporte une sensation de paix et de renouveau, un contraste saisissant avec l'intimité des allées plus profondes du cimetière.
C'est un lieu qui invite au recueillement. Tu sens le respect qui émane de chaque recoin. Les voix se font plus basses, les pas plus lents. C'est un endroit pour la contemplation, pour se connecter à l'histoire, à la nature, et peut-être un peu à soi-même. Sois respectueux, ne touche pas aux monuments si ce n'est pas nécessaire, et laisse la quiétude du lieu t'envelopper.
Quand tu repars, tu emportes avec toi cette sensation de calme profond, cette impression d'avoir traversé un portail temporel. L'air te semble de nouveau plus léger, mais une empreinte de silence et de beauté demeure en toi.
Olya from the backstreets