Imagine une seconde. Tu n'es pas seulement sur un bateau ; tu es suspendu entre deux mondes. L'air change, il devient plus frais, plus dense, te caressant la peau avec une humidité salée qui te réveille. Tu entends d'abord le clapotis doux et régulier de l'eau contre la coque en bois, un rythme apaisant qui te berce. Puis, un silence. Un silence habité par le murmure des vagues qui se heurtent aux parois rocheuses, un son profond et résonnant qui vibre à travers tes os.
Tu sens l'espace se rétrécir autour de toi, l'obscurité grandir, mais ce n'est pas une obscurité effrayante. Non. C'est une obscurité qui promet. Et puis, la lumière. Elle n'arrive pas en un flash, mais elle se déploie, une nappe d'un bleu irréel, presque électrique, qui semble émaner de l'eau elle-même. C'est un bleu que tu n'as jamais vu, qui te submerge, qui te pénètre. Tes yeux, même fermés, sentent sa présence. C'est le bleu le plus profond, le plus pur, le plus vivant. Il danse sur les parois de la grotte, projetant des reflets mouvants sur le plafond de roche, te donnant l'impression d'être sous l'eau, respirant dans un aquarium géant.
Tu respires cet air salé et iodé, il emplit tes poumons, te connectant directement à l'océan. La fraîcheur de l'eau, si proche, te monte aux narines. Tu sens la douce ondulation du bateau sous toi, une légère danse qui te fait te sentir un avec cet environnement aquatique. C'est une sensation de calme profond, d'émerveillement pur, comme si le temps s'était suspendu, ne laissant place qu'à cette symphonie visuelle et sensorielle. Ce bleu t'enveloppe, il s'infiltre en toi, et quand tu ressors, il te semble qu'une partie de cette lumière, de cette paix, te suit.
Pour t'y rendre depuis La Valette, le plus simple est de prendre un bus direct jusqu'à Wied iz-Zurrieq. Le bus 71 ou 73 t'y emmène en une quarantaine de minutes. Une fois sur place, tu verras les guichets pour les tours en bateau. Essaie d'y aller tôt le matin, juste après l'ouverture. Non seulement tu auras la meilleure lumière pour que le bleu soit le plus intense, mais tu éviteras aussi la foule, et c'est beaucoup plus agréable.
Les bateaux sont de petits *luzzu* traditionnels, ils peuvent prendre une dizaine de personnes. Le tour dure environ 20-25 minutes et t'emmène à travers plusieurs grottes, pas juste une. Le prix est fixe, autour de 8-10 euros par personne. N'oublie pas une bouteille d'eau et de la crème solaire si tu attends un peu, car la zone d'embarquement est exposée. Et un chapeau, c'est toujours une bonne idée. Pas besoin de maillot de bain, on ne se baigne pas pendant le tour.
Ce qui marque aussi, c'est le contraste saisissant. Après avoir été enveloppé par cette symphonie de bleus et de silence à l'intérieur des grottes, le retour à la lumière du jour est presque une révélation. Le monde extérieur semble soudainement plus vif, plus coloré, comme si tes sens avaient été aiguisés par l'expérience. Tu te retrouves face aux falaises escarpées qui plongent dans la Méditerranée, le vent qui fouette ton visage, et cette sensation persiste : un mélange d'humilité face à la puissance de la nature et de gratitude pour un moment de pure magie. C'est une couleur, une vibration, que tu emportes avec toi bien après avoir quitté les lieux.
Léa de la route