Alors, tu veux savoir ce qu'on "fait" vraiment au sanctuaire Meiji Jingu à Tokyo ? Imagine ça : tu es en plein cœur de Shibuya ou Harajuku, le bourdonnement de la ville est partout, les néons clignotent, les voix se mélangent. Et puis, tu tournes un coin, et là, tu sens déjà l'air changer. C'est plus frais, plus calme. Tu marches un peu, et tout d'un coup, tu te retrouves face à une porte immense, un torii géant en bois. Ce n'est pas juste une porte, c'est comme un sas. Tu passes en dessous, et le son de la ville commence à s'estomper, comme si quelqu'un baissait le volume. Tu sens le gravier sous tes pieds, chaque pas fait un léger crissement. L'air est soudain plus pur, imprégné d'une odeur de terre humide et de bois ancien. C'est le début.
Une fois passé ce premier torii, tu es sur un chemin large, bordé d'arbres tellement hauts que tu dois lever la tête pour en voir la cime. Tu marches. Tu entends juste le léger bruissement des feuilles au-dessus de toi, peut-être quelques oiseaux lointains, et le crissement régulier du gravier sous tes chaussures. C'est une immersion progressive. Le soleil joue à travers les branches, créant des taches de lumière et d'ombre sur le sol. Sur ta droite, tu vois ces immenses tonneaux de saké empilés, et à gauche, des barils de vin français, c'est un peu surprenant mais ça fait partie du décor. La promenade est longue, environ dix minutes, mais elle est essentielle. Elle te prépare, elle te vide l'esprit du tumulte extérieur. Tu sens l'humidité de la forêt, une fraîcheur agréable même en plein été.
Au bout de ce chemin forestier, tu arrives à une autre porte torii, plus petite, et là, le chemin s'élargit sur une grande cour. C'est là que les choses deviennent plus concrètes. Tu vas voir un bassin en pierre, le "temizuya", avec des louches en bois. C'est le moment de la purification. Tu prends une louche, tu la remplis d'eau fraîche. Tu la sens glisser sur tes mains, c'est un geste simple mais important. Tu rinces d'abord ta main gauche, puis ta main droite, puis tu verses un peu d'eau dans ta main gauche pour te rincer la bouche. Enfin, tu inclines la louche pour que l'eau restante nettoie le manche avant de la reposer. C'est une façon de te préparer, d'entrer dans le respect du lieu. C'est une sensation de pureté, un petit rituel qui te connecte.
Après la purification, tu continues vers le bâtiment principal. Tu te trouves devant une grande esplanade et les bâtiments du sanctuaire, faits de bois sombre et de toits courbés. Il y a une atmosphère de recueillement, un silence respectueux, même s'il y a du monde. Tu peux t'approcher de l'autel principal. Tu verras des gens jeter des pièces dans une grande boîte en bois, incliner la tête deux fois, frapper dans leurs mains deux fois, puis incliner à nouveau et prier silencieusement. Tu peux faire de même si tu le souhaites. C'est un moment intime, même au milieu de la foule. Tu peux aussi acheter des "ema", ces petites plaques de bois sur lesquelles tu écris un vœu, et les accrocher avec des centaines d'autres. Ou un "omikuji", une sorte de prédiction ou de conseil divin, sans que ce soit une prédiction de bonne ou mauvaise fortune, plutôt un poème ou un enseignement. Tu sens le bois sous tes doigts en les écrivant, l'odeur légère de l'encre.
Juste à côté du sanctuaire principal, il y a le Jardin Impérial, souvent un peu oublié. C'est un petit supplément payant, mais crois-moi, ça vaut le coup. C'est un havre de paix encore plus profond. Imagine des allées sinueuses, des étangs paisibles où tu peux entendre le léger ploc-ploc des poissons, et en juin, c'est une explosion de couleurs avec les iris en fleur. Le parfum des fleurs, si tu y vas à la bonne saison, est incroyable. Tu peux t'asseoir un instant sur un banc, sentir la terre sous tes pieds si tu as des sandales, ou simplement la tranquillité t'envelopper. C'est un endroit où tu peux vraiment te déconnecter, sentir la nature et le calme. C'est un secret bien gardé au cœur de la ville.
En sortant, tu retraces tes pas sur le chemin de gravier. Le bruit de la ville recommence à se faire entendre, progressivement. C'est comme si tu revenais doucement à la réalité, mais avec une sensation de paix et de renouveau. C'est une visite qui ne se résume pas à "voir" des choses, mais à les "ressentir". Tu as marché, tu as respiré, tu as touché, tu t'es purifié, et tu as participé, même discrètement, à un moment de recueillement. C'est une parenthèse de sérénité au milieu de l'effervescence tokyoïte, une pause pour l'âme. Et juste à côté, tu as Harajuku pour te replonger dans le bain de la folie japonaise !
À bientôt sur la route,
Olya from the backstreets